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Rapport relatif au parcours des personnes privées de liberté au tribunal judiciaire de Colmar et locaux de garde à vue de son ressort (Haut-Rhin)

Rapport relatif au parcours des personnes privées de liberté au tribunal judiciaire de Colmar et locaux de garde à vue de son ressort (Haut-Rhin)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, aux ministères de l’intérieur et de la justice auxquels un délai de quatre semaines a été fixé pour produire leurs observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

 

Synthèse

Quatre contrôleurs ont visité de façon inopinée, entre le 2 et le 5 avril 2024, les geôles du tribunal judiciaire de Colmar et de cinq locaux de garde à vue relevant de son ressort : le commissariat central de Colmar et quatre brigades de gendarmerie sises à Colmar, Soultz-Guebwiller, Neuf-Brisach et Munster, afin de contrôler le parcours judiciaire des personnes depuis leur interpellation jusqu’à leur présentation au tribunal.

Le tribunal avait été précédemment contrôlé en 2018 et le commissariat en 2013. Il s’agissait d’une première visite pour les locaux relevant de la gendarmerie.

Dans le ressort, il a été constaté une forte hétérogénéité des lieux de garde à vue, l’écart étant considérable entre les bâtiments anciens (Neuf-Brisach), offrant des conditions indignes d’accueil, et les constructions récentes (Soultz-Guebwiller, commissariat de Colmar). La plupart des cellules a une superficie inférieure à 7 m2, les plus petites ayant moins de 5 m2 (Neuf-Brisach et Munster). Au tribunal judiciaire, l’unique cellule, de moins de 10 m² est, par la force des choses, collective.

A l’exception du commissariat, le retrait des effets personnels revêt un caractère trop systématique. Ces mesures sont à mettre en œuvre de façon individualisée, nécessaire et proportionnée.

Les personnes gardées à vue ne bénéficient nulle part de petits-déjeuners suffisants. Dans certains lieux, l’accès à l’eau potable n’est pas assuré tout au long de la mesure. Les kits d’hygiène ne sont jamais distribués au commissariat et rarement en gendarmerie et la douche n’est proposée que sur un site, portant ainsi atteinte à la dignité des personnes privées de liberté. De plus, l’intimité des personnes gardées à vue n’est pas respectée partout dans la mesure où dans certaines brigades de gendarmerie, les toilettes sont directement visibles à travers l’œilleton.

Dans toutes les gendarmeries contrôlées, les personnes gardées à vue sont laissées seules la nuit, sans pouvoir recourir à un dispositif d’appel.

Le document récapitulatif des droits n’est pas remis, ni partout laissé à la disposition des personnes gardées à vue. Le droit de communiquer avec un proche n’est pas toujours expliqué à la personne gardée à vue. L’information concernant les droits d’accès, de modification, de conservation et de suppression des données personnelles reste insuffisante, ainsi que celle relative à l’accès à la procédure de garde à vue et aux modalités d’effacement.

Le placement en cellule de dégrisement d’une personne en état d’ivresse publique et manifeste ne peut pas se faire sans avis médical, ce qui n’est pas toujours respecté.

Enfin, il importe que tous les sites de garde à vue disposent d’un registre spécial de retenue des étrangers pour vérification du droit au séjour et que les registres soient rigoureusement contrôlés.

Un rapport provisoire a été adressé le 7 mai 2024 au commissaire de police du commissariat de Colmar, au colonel, commandant le groupement de gendarmerie du département ainsi qu’à la présidente du tribunal judiciaire de Colmar et au procureur près ledit tribunal. Seul le colonel, commandant le groupement de gendarmerie départemental a adressé, le 4 juin 2024, ses observations, qui ont été intégrées dans le présent rapport définitif.