Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, aux ministères de la justice et de la santé auxquels un délai de quatre semaines a été fixé pour produire leurs observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.
Synthèse
Quatre contrôleurs ont effectué un contrôle inopiné de l’établissement pénitentiaire pour mineurs d’Orvault (Loire-Atlantique) du 11 au 17 mai 2024. Il s’agissait d’une quatrième visite, les précédents ayant été réalisés en novembre 2009, en mai 2016 et en novembre 2020.
Le rapport provisoire rédigé à l’issue de cette visite a été transmis le 25 juillet 2024 au chef d’établissement, à la direction territoriale de la protection judiciaire de la jeunesse de la Loire-Atlantique, aux autorités judiciaires, au rectorat de l’académie de Nantes et à l’agence régionale de santé Pays de la Loire. Le chef d’établissement a transmis des observations intégrées au présent rapport.
L’établissement est placé sous l’autorité du directeur interrégional des services pénitentiaires de Rennes (Ille-et-Vilaine) et se situe dans le ressort du tribunal judiciaire de Nantes, bien qu’accueillant des personnes détenues en provenance d’autres juridictions. Il a été mis en service le 5 février 2008. L’établissement est conçu pour la détention de 59 mineurs âgés de 13 à 18 ans. Au jour de la visite, la capacité opérationnelle était de 49 places pour 41 mineurs hébergés au premier jour de la visite. Sept étaient âgés de moins de 16 ans. Malgré des profils différents, aucun régime différencié n’est appliqué.
L’établissement fonctionne en gestion déléguée pour la maintenance, la restauration, le nettoyage et le service à l’immeuble. Depuis la dernière visite, la structure immobilière et les locaux de l’établissement sont inchangés. Néanmoins, les cours de promenade ne bénéficient plus de banc ou d’équipement sportif à la suite des mutineries du mois de mai 2023. Les parloirs n’ont pas fait l’objet de travaux et ne permettent toujours pas le respect de la confidentialité des échanges, et les boxes d’attente du quartier disciplinaire ne sont pas plus équipés d’un banc. Les conditions d’hygiène et de restauration sont de qualité, mais l’offre des cantines est inadaptée aux mineurs, les produits étant décrits par tous comme trop sucrés et peu variés.
Malgré un absentéisme conséquent, les professionnels sont apparus en nombre suffisant pour exercer leur mission auprès des mineurs. Les nombreuses réunions entre les différents partenaires permettent de faciliter la circulation de l’information bien que l’absence de réunions de régulation entre les binômes éducateur et surveillant fragilise l’harmonisation des pratiques. De même, la communication parcellaire entre les différents services éducatifs et sanitaires compromet l’organisation et la continuité des soins du mineur à sa sortie, a contrario du maillage professionnel important et satisfaisant mis en place à son entrée dans l’établissement.
Les mineurs ne bénéficient pas de temps éducatifs individuels et collectifs suffisants, les repas à deux mineurs étant limités tout comme les activités au sein des unités ou sur le pôle socio-éducatif. De même, les temps de scolarité ont paru très insuffisants, bien qu’organisés sur 40 semaines par an. L’accès à la bibliothèque est encore trop restreint. Néanmoins, les activités sportives sont variées et adaptées. Au total, les mineurs ne sont en moyenne occupés que 13 heures par semaine et sont sans occupation le week-end.
L’accès aux soins est garanti, des actions d’éducation à la santé déployées et une bonne articulation entre les psychologues des différents services est relevée. Le partage d’informations sur la prévention du suicide est efficient. En revanche, la distribution des médicaments est apparue particulièrement inquiétante, les mineurs se retrouvant avec une quantité importante de médicaments en cellule dont la prise effective n’est pas garantie, dans un contexte de circulation de stupéfiants important au moment du contrôle.
Depuis la dernière visite, le dispositif de vidéosurveillance, déjà qualifié d’obsolète, est inchangé et ne permet pas de garantir la sécurité des mineurs. Les vidéos ne sont pas plus exploitées lors des enquêtes disciplinaires. Si les fouilles sont tracées et limitées, certaines fouilles intégrales systématiques ne respectent pas les principes de nécessité et de subsidiarité et ne se déroulent pas nécessairement dans des locaux adaptés en détention. Les moyens de contrainte et l’usage de la force sont mesurés et tracés bien que le niveau d’escorte reste encore trop lié au statut pénal du mineur et non à son comportement en détention. Les moyens de contrainte utilisés lors des extractions médicales sont en revanche apparus comme disproportionnés au risque présenté par le mineur et attentatoire à la dignité du mineur hospitalisé. Les mesures de bon ordre sont peu variées, sous-utilisées et ne sont pas notifiées formellement au mineur ni à l’autorité parentale ou au juge mandant, empêchant tout recours. De même, les mesures de promenade seul et l’affectation temporaire d’un mineur dans une cellule de l’unité réservée aux filles en retour de permission sont imprécises, ne font l’objet d’aucune information et ne sont pas encadrées. Par ailleurs, si le déroulé des commissions de discipline n’appelle pas d’observation, le président de la commission se retrouve régulièrement autorité de poursuite et de jugement.
L’ouverture sur l’extérieur reste limitée. L’accès au droit de visite est garanti, mais la majorité des mineurs ne bénéficie pas de parloirs et les visiteurs de prison n’interviennent pas dans l’établissement. Le maintien des liens familiaux est également limité par le coût des communications téléphoniques. L’outil numérique ne permet pas plus d’offrir au mineur un portail vers l’extérieur. L’information juridique générale fait défaut, aucun point d’accès au droit n’étant organisé et le délégué du Défenseur des droits n’étant pas plus impliqué en détention.
Enfin, les transferts des jeunes majeurs dans des établissements pour majeurs sont préparés et accompagnés tout comme les sorties, malgré des durées de détention manquant de prévisibilité. Cependant, les mineurs ne bénéficient majoritairement que d’aménagements de peine sous la modalité de la libération sous contrainte de plein droit, les autres modalités d’aménagement étant très peu utilisées, voire inutilisées comme la conversion de peine.
Les réponses apportées à ce stade par le chef d’établissement démontrent une prise en compte d’une partie des recommandations du Contrôleur général des lieux de privation de libertés.