Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, au ministère de l’intérieur auquel un délai de quatre semaines a été fixé pour produire ses observations.
Synthèse
Cinq contrôleurs, dont un photographe, ont effectué, du 9 au 12 mai 2023, une visite inopinée du centre de rétention administrative (CRA) de Toulouse – Cornebarrieu (Haute-Garonne). Il s’agissait de la quatrième visite sur ce site, les précédentes ayant eu lieu en 2009, 2012 et 2015, dont les recommandations précédentes n’avaient été que partiellement prises en compte.
Le rapport relatif à cette visite a fait l’objet d’échanges contradictoires avec la cheffe du CRA, le président du tribunal judiciaire et le procureur de la République de Toulouse, dont les observations ont été prises en compte, ainsi qu’avec le directeur général de l’agence régionale de santé d’Occitanie qui n’a pas fait valoir d’observations.
Pour accompagner la volonté ministérielle, datant d’août 2022, demandant de privilégier la reconduite des étrangers causant un trouble à l’ordre public, le centre n’accueille plus de mineurs ou de familles. La capacité opérationnelle du CRA a été modifiée depuis la précédente visite avec la fermeture de facto du secteur « familles », transformé en secteur pour femmes, le précédent secteur pour femmes devenant un secteur supplémentaire pour hommes. Le centre compte ainsi désormais 123 places, dont 110 pour les hommes (trois secteurs de 30 places chacun et un secteur de 20 places) et 13 pour les femmes.
Les locaux, inchangés par rapport aux précédentes visites, offrent des conditions de vie minimalistes et carcérales, aggravées par un entretien insuffisant.
Il est relevé positivement un accès aux soins organisé et un dispositif d’assistance juridique, assuré par La Cimade, efficient. Mais les prestations « hôtelières » sont, dans bien des domaines (restauration, matériel d’hygiène, aides aux personnes sans ressources) insuffisantes et, si l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) est bien présent, ses prestations sont trop limitatives. Si l’information des personnes retenues sur leurs droits est correctement assurée, celle sur le fonctionnement quotidien du centre est insuffisante en l’absence de remise systématique aux arrivants du dépliant prévu et d’affichage dans les secteurs de vie.
Sans autres possibilités d’activités que la télévision, installée dans chaque chambre, l’oisiveté et l’ennui règnent, avec les conséquences négatives que cela finit par avoir sur le comportement des personnes retenues.
Le site reste difficile d’accès en transports en commun et est dépourvu de parking et d’auvent pour les visiteurs. Si les horaires de visites sont larges et souples, les liens avec l’extérieur ne sont pas facilités par l’interdiction des téléphones dotés de dispositif de prise de prise de vue, le manque de confidentialité des cabines téléphoniques, l’absence d’accès à Internet, aux messageries électroniques et aux réseaux sociaux.
Enfin, l’ambiance en rétention est apparue comme donnant la priorité à la sécurité. L’évolution du profil des personnes retenues, au passif judiciaire marqué, a été présentée comme source de tensions fréquentes, tant entre personnes retenues que vis-à-vis des policiers. Ce facteur expliquerait le recours fréquent aux chambres de mise à l’isolement sécuritaire, procédure dont l’encadrement juridique et la formalisation sont inexistantes (manque de motivations, absence de décision formalisée et notifiée, absence de limitation de la durée, absence de possibilité de recours). Enfin, l’utilisation systématique et non individualisée des moyens de contrainte lors de tous les déplacements en dehors du CRA est également attentatoire aux droits.