Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, au ministère de la santé auquel un délai de quatre semaines a été fixé pour produire ses observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.
Synthèse
Huit contrôleurs ont effectué une visite inopinée du centre hospitalier Marius Lacroix rattaché au Groupe Hospitalier (GH) Littoral Atlantique des hôpitaux La Rochelle-Ré-Aunis (département de Charente-Maritime) du 8 au 15 janvier 2024.
Le pôle de psychiatrie du GH, dit hôpital Marius Lacroix, dessert l’ensemble de la population du territoire de santé du Nord de la Charente-Maritime, soit environ 370 000 habitants pour 646 000 habitants sur le département.
L’établissement a majoritairement conservé la sectorisation tant en intra qu’en extra hospitalier. Les trois secteurs géographiques s’organisent autour d’une unité fermée et d’une unité ouverte et offrent 101 lits d’hospitalisation complète auxquels il faut ajouter 6 chambres d’isolement (CI) et 6 chambres dites « de suite ».
D’autres secteurs sont eux organisés en intersectoriel : le service des urgences psychiatriques rochelaises « CAPSUL 17 » qui comprend 6 lits de post-urgences psychiatriques et une offre interne en psychiatrie de liaison, le service intersectoriel de prises en charge des patients souffrant de troubles autistiques ou apparentés (FISETAA) qui regroupe trois unités d’hospitalisation (Envol, Rocher 2 et Arc-en-ciel) et comprend 44 lits et enfin le service de réhabilitation psycho-sociale et remédiation cognitive qui comprend deux unités d’hospitalisation complète et 38 lits. L’unité pour les adolescents Soléado dispose de 9 lits en intersectoriel.
L’établissement est attractif pour le personnel médical. Il est situé à quelques kilomètres du centre-ville et bénéficie d’une dynamique médicale ancienne ce qui en fait d’ailleurs un pôle d’attractivité pour les internes en psychiatrie sur la région.
Les patients reçoivent des soins de qualité tout au long de leur parcours de soin, depuis l’admission jusqu’à la préparation à la sortie. Les psychiatres travaillent en bonne harmonie avec les équipes soignantes en favorisant des réunions de synthèse pluridisciplinaires intégrant tant le personnel de l’intra que de l’extra hospitalier, les assistantes de service social (ASS) et les psychologues. L’excellente qualité des soins somatiques est à souligner, de même que la prise en charge des adolescents, lesquels bénéficient par ailleurs d’un bâtiment neuf et bien pensé. Des équipes mobiles ont été créées au cours des dernières années pour assurer la continuité des soins en ambulatoire. Les activités thérapeutiques sont diversifiées et la cafétaria est un véritable lieu de vie ouvert tous les jours et placé au centre de l’établissement.
La quasi-absence de recours à la contention est aussi à mettre à l’actif de l’établissement, de même que la réflexion en cours pour limiter les atteintes aux droits des patients de la FISETAA et la perspective d’une maison d’accueil spécialisée (MAS) pour accueillir une partie des patients au long cours de cette filière.
Par ailleurs les patients admis en soins sans consentement (SSC) sur décision du représentant de l’Etat (SDRE) sont historiquement peu nombreux dans l’établissement, les maires étant peu enclins à prononcer cette mesure. Les patients admis selon cette procédure, particulièrement attentatoire aux droits, bénéficient d’une prise en charge équivalente aux patients admis selon les procédures classiques et peuvent par exemple intégrer les unités du pôle de réhabilitation pour préparer la sortie.
Des axes d’amélioration ont aussi été identifiés par les contrôleurs.
S’agissant de la prise en charge médicale, un secteur souffre d’un temps médical insuffisant. Peu de patients des unités fermées ont accès aux activités thérapeutiques et il est déploré l’absence de réunions soignants-soignés. Les traitements doivent être distribués aux patients dans des conditions garantissant la confidentialité. Des solutions sont à trouver rapidement pour le transport des patients entre l’hôpital Marius Lacroix et l’hôpital Saint-Louis pour éviter des temps d’attente excessifs pour les patients dans des conditions indignes.
En matière de mesures d’isolement, l’établissement n’a pas développé de politique active d’alternative à cette pratique. Il n’existe pas d’espaces d’apaisement ni d’analyse des pratiques. Des prescriptions « si besoin » persistent et des mesures d’isolement à titre punitif ont pu être constatées. La surveillance médicale doit par ailleurs être effective tout au long de la mesure d’isolement selon la fréquence déterminée par la loi, ce qui n’est pas le cas actuellement, le logiciel permettant de modifier les horaires de surveillance.
L’établissement fait face à des pics de suroccupation qui impactent la prise en charge des patients : certains sont parfois admis dans des unités hors secteur ou n’ayant pas vocation à accueillir des admissions ; la mesure d’isolement peut être effectuée dans un espace non dédié en chambre dite « de suite » ; le patient ne conserve pas sa chambre hôtelière en cas d’isolement ; la chambre d’un patient en permission de sortie peut être occupée par un autre patient.
Les restrictions à la vie quotidienne sont relativement peu nombreuses sauf s’agissant de l’interdiction du téléphone portable dans les unités fermées, laquelle interdiction systématique n’est pas justifiée. Par ailleurs la récente baisse de la quantité des repas (notamment pour le premier repas lors d’une admission) et la suppression des viennoiseries du dimanche sont ressenties comme une dégradation des conditions de vie par les patients et le personnel.
La liberté d’aller et venir n’est pas toujours assurée pour les patients en soins libres (SL) au sein de l’établissement notamment au sein des unités fermées. Des restrictions existent aussi pour les sorties d’établissement qui sont assujetties à une autorisation médicale aussi bien pour les patients en soins sans consentement (SSC) que pour ceux en SL, ce qui n’est pas justifié.
Les conditions matérielles de prise en charge sont de bonne qualité dans les unités les plus récentes, notamment dans le bâtiment Les Pertuis. Le contraste est important avec les unités plus anciennes lesquelles abritent encore des chambres doubles et des chambres ne bénéficiant pas de salle de bain individuelle. Il manque des verrous de confort et aucune chambre hospitalière ne dispose de bouton d’appel (hormis dans l’unité Pierre Loti), même dans les unités les plus récentes. Les patients n’ont pas d’armoire pouvant fermer à clé.
Des insuffisances ont été constatées en matière d’information des patients et de contrôle externe de l’établissement. Les motivations des décisions du directeur sont insuffisantes et ces décisions ne sont pas toujours remises aux patients. Les droits prévus à l’article L. 3211-3 du code de la santé publique ne sont pas systématiquement notifiés. Le contrôle du JLD est effectif mais la commission départementale des soins psychiatriques (CDSP) ne se réunit plus depuis 2018 et les contrôles externes sont trop rares.
Le présent rapport a fait l’objet d’une phase contradictoire. Les observations reçues de la part de la directrice générale attestent de la volonté de l’établissement d’œuvrer à améliorer la qualité de la prise en charge des patients.