Ce rapport a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, aux ministères de la justice et de la santé auxquels un délai de quatre semaines a été fixé pour produire leurs observations.
Synthèse
La maison d’arrêt de Tours est un établissement ancien, situé en centre-ville, qui comporte un quartier pour hommes (MAH), un quartier pour mineurs et un quartier de semi-liberté. Elle a bénéficié de rénovations régulières à l’intérieur d’un bâti contraint, sans adapter les conditions architecturales d’encellulement.
Ainsi, les cellules de 10m2, à l’exception de cinq de 14 m2, accueillent presque toutes deux à trois détenus pour lesquels la surface disponible par individu est de moins de 2m2 pour certains, moins de 3m2 pour la grande majorité. Cette surface est à mettre en rapport avec un taux d’occupation de 206%. Seules 5 personnes sur 235 bénéficient d’un encellulement individuel imposé par leur situation personnelle.
Les locaux se caractérisent par des parties rénovées et d’autres dans un état de vétusté empêchant un entretien d’hygiène efficace. Une partie de la détention présente une luminosité naturelle insuffisante en cellule ; par ailleurs, le réseau électrique est défaillant.
Enfin, les détenus n’ont pas accès aux plaques chauffantes, à un réfrigérateur adapté au nombre d’occupants, n’ont ni rangement suffisant ni interphone.
La population est majoritairement jeune et pauvre, tous ont moins de 70 ans et un quart est sans ressources. 40% des détenus condamnés purgent des peines de moins de six mois. Ils sont hébergés sur trois étages où ne se trouve qu’un surveillant pour environ 80 personnes.
L’accès aux douches n’est pas possible quotidiennement ; les travailleurs et ceux qui bénéficient d’une activité physique y ont cependant accès systématiquement. L’intimité n’est pas respectée dans ces douches ni dans les cellules dans les moments d’hygiène et de satisfaction des besoins naturels.
L’accès aux soins est entravé par l’insuffisance des extractions médicales réalisables, ce qui génère une perte de chance pour des patients relevant de consultations et examens spécialisés. Par ailleurs, le secret médical n’est pas respecté lors des soins effectués dans les établissements de santé.
En rapport avec ces conditions de détention, le temps passé en cellule est très élevé, 20h40 par jour a minima au regard des possibilités maximales de sorties proposées.
Les fouilles intégrales sont nombreuses et réalisées sur des motivations discutables ; elles ne respectent pas le caractère exceptionnel lié à la recherche d’objet dangereux.
La faible survenue de violence et une relative sérénité en détention ne tiennent qu’au professionnalisme et à la souplesse des surveillants et de leur cheffe d’établissement, mais au prix de conditions de travail pour les fonctionnaires anormalement difficiles.
Enfin, les outils judiciaires permettant la réduction de la population carcérale ne sont pas suffisamment mis en œuvre : de nombreuses peines de moins de six mois sont exécutées en détention, les libérations sous contrainte sont peu développées et les conversions de peine ne sont pas utilisées. Les transferts de « désencombrement » empêchent tout travail d’insertion sociale et professionnelle, éloignent des familles et entrainent des ruptures de prise en charge globale qui sont facteurs de récidive.
Au regard de ces critères, l’atteinte à la dignité, telle que définie par les règles nationales, européennes et internationales, est objectivée par le présent contrôle pour tous les détenus du quartier des hommes de cet établissement.
En réponse au rapport provisoire dénonçant une flagrance de l’indignité dans cette prison, les autorités judiciaires évoquent la compétence du CGLPL s’agissant des décisions de justice là où les contrôleurs évoquent la politique pénale. Elles soulignent une analyse de leurs pratiques mais qui concerne la période de la pandémie et la solution d’une prison neuve dans un avenir lointain, sans répondre aux problèmes majeurs et présents du placement quotidien de personnes dans des conditions insalubres et indignes.