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Rapport de la deuxième visite du centre hospitalier Camille Claudel à La Couronne (Charente)

Rapport de deuxième visite du centre hospitalier Camille Claudel à La Couronne (Charente)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, au ministère de la santé auquel un délai de quatre semaines a été fixé pour produire ses observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

 

Synthèse

Huit contrôleurs ont effectué une visite, annoncée la semaine précédente, du centre hospitalier Camille Claudel (CHCC) de Couronne, banlieue proche d’Angoulême (Charente) du 6 au 17 mars 2023. L’établissement avait déjà été contrôlé en 2008.

Le CHCC est l’unique établissement public de santé mentale du département de la Charente ; il accueille 15 000 patients par an dans ses unités d’hospitalisation ou dans ses structures de consultation.

Le secteur intra-hospitalier a été récemment restructuré en supprimant quatre-vingts lits avec en parallèle le passage de quatre à deux pôles de soins associant un pôle adulte et un pôle « enfant/adolescent ».

Le CHCC a désormais une capacité de 157 lits adultes et 8 lits adolescents. L’établissement se compose pour la filière de la psychiatrie adulte d’une unité d’accueil et d’orientation et de deux unités d’admissions fermées pour les personnes souffrant de troubles du spectre de l’autisme (TSA), d’une unité d’admissions ouvertes pour ce même profil de patients, d’une unité d’admission fermée, d’une unité ouverte de moyen et long séjour, d’une unité fermée de moyen et long séjour.

L’établissement dispose de nombreux centres médico-pédagogiques (CMP) et d’équipes mobiles permettant notamment la prise en charge des personnes présentant un TSA, les patients âgés, ceux souffrant d’addictions ou en situation de précarité et également d’un centre de réhabilitation psychosociale et d’une unité d’hospitalisation à domicile (HAD).

La filière de la pédopsychiatrie est organisée autour d’une unité de soins de périnatalité et petite enfance (0 à 3 ans), d’une unité d’hospitalisation de jour/CMP (pour les 3 à 8 ans), d’un hôpital de jour (pour les 8 à 12 ans), d’un institut thérapeutique éducatif et pédagogique (ITEP), d’une maison « des ados » et d’une unité de soins aux adolescents (12-18 ans).

Parmi les 80 lits supprimés, figurent les 10 lits de l’unité d’accueil et d’observation (UAO) en raison d’un manque d’effectif médical or cela n’est pas sans impact sur le taux d’occupation dans les unités d’admission. Ainsi, pendant les six derniers mois, l’établissement a connu plusieurs épisodes de tensions capacitaires avec des transfèrements de patients d’une unité à une autre, y compris la nuit, pour libérer des lits d’accueil. La recherche de nouveaux psychiatres doit constituer une priorité absolue de l’établissement auquel il manque déjà 17 médecins dans cette spécialité. L’effectif de somaticiens est également insuffisant, ce qui les oblige à intervenir prioritairement auprès des patients hospitalisés au détriment de ceux suivis en ambulatoire. Pour autant, l’établissement n’a pas cédé à la facilité du recrutement médical par intérim ce qui doit être souligné. Malgré les quinze postes d’infirmiers diplômés d’Etat (IDE) manquant également, l’effectif de sécurité de soignants est toujours respecté.

L’établissement a également réussi à maintenir un nombre important d’activités thérapeutiques et occupationnelles, notamment en moyen séjour et pour les adolescents, ce qui est indispensable car elles sont une composante à part entière du soin. Un travail intéressant a été relevé concernant l’autonomie des patients avec le centre de réhabilitation psychosociale de proximité (CREHAB) ou le case manager.

L’attention portée aux usagers apparaît dans les documents dès la lecture du projet d’établissement. Cette impression est renforcée par le fait que la commission des usagers est fonctionnelle et active.

Concernant les droits des patients en soins sans consentement (SSC), le rétablissement du fonctionnement de la commission départementale des soins psychiatriques (CDSP), interrompu depuis 2019, constitue une urgence, s’agissant des voies de recours des patients pour l’examen de leur mesure de SSC.

Le registre de la loi est bien tenu malgré des manquements concernant le suivi de l’information des patients et de la notification des décisions. Le cadre et l’organisation de l’audience du JLD ont paru adaptés et la présence de l’établissement à l’audience est vu comme une bonne pratique.

L’information des patients est assurée via le règlement intérieur très complet. Les règles de vie dans toutes les unités sont à jour, sauf à Dali, et bien expliquées par les soignants. L’information relative à la procédure de soins sans consentement est également effectuée de façon satisfaisante bien que les soignants n’aient pas été spécifiquement formés.

L’établissement ne présente pas un système de sécurité excessif, néanmoins il s’est ajouté un certain nombre de règles, notamment pour les patients en soins sans consentement. Ainsi, il est demandé l’autorisation à la préfecture pour que le patient se rende seul à la cafétéria du site.

Concernant l’isolement et la contention, l’établissement s’est organisé pour répondre aux exigences de la loi de 2022. Néanmoins il n’existe pas de registre d’isolement-contention adapté permettant de calculer les durées d’isolement et de contention : il est nécessaire de mettre en œuvre une organisation de la certification assurant le respect des délais légaux et permettant de réaliser les extractions nécessaires aux analyses. Des patients en soins libres (SL) sont isolés, le juge n’est notamment pas saisi de l’isolement ou de la contention des personnes souffrant de TSA. L’utilisation du bouclier de protection comme outil de contention est un mésusage. A contrario, la création d’une équipe spécialisée pour la prise en charge des isolements et contentions (l’EPIC), est une très bonne pratique, tout comme la volonté de mettre en place des salons d’apaisement dans toutes les unités.

Enfin, l’état des bâtiments est très disparate et certaines unités nécessitent des travaux urgents.

Le rapport relatif à cette visite a fait l’objet d’échanges contradictoires avec le chef d’établissement, dont les observations ont été prises en compte, ainsi qu’avec la présidente et la procureure de la République du président du tribunal judiciaire d’Angoulême, le directeur général de l’agence régionale de santé de Nouvelle Aquitaine et la préfète de Charente qui n’ont pas fait valoir d’observation.