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Rapport de visite de l’établissement public de santé mentale Etienne Gourmelen à Quimper (Finistère)

Rapport de visite de l’établissement public de santé mentale Etienne Gourmelen à Quimper (Finistère)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, au ministère de la santé auquel un délai de huit semaines a été fixé pour produire ses observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

Suivi des recommandations à 3 ans – Etablissement public de santé mentale Etienne Gourmelen Quimper

 

Synthèse

Huit contrôleurs ont effectué une visite de l’établissement public de santé mentale (EPSM) Etienne Gourmelen, situé à Quimper (Finistère), du 13 au 17 janvier 2020. Il s’agissait de la première visite de cet établissement. A l’issue un rapport provisoire été adressé au directeur de l’EPSM, à la délégation départementale de l’ARS Bretagne et aux chefs de juridiction du tribunal judiciaire de Quimper. En retour la présidente de cette juridiction et le juge des libertés et de la détention ont souligné l’excellence de leurs relations avec l’établissement tandis que la direction de l’EPSM a fait valoir plusieurs observations intégrées au présent rapport définitif.

L’EPSM Etienne Gourmelen dont les premiers services ont été ouverts au XIXème siècle, est installé à proximité du centre-ville, sur un éperon rocheux. La structure est entièrement ouverte. Des constructions récentes ont remplacé les anciennes, classées et pour partie en cours de cession au moment du contrôle.

Établissement de référence pour le territoire du Finistère Sud / Sud-Ouest, dit de Cornouaille, l’EPSM couvre trois secteurs de psychiatrie pour adultes et deux secteurs de psychiatrie pour enfants, soit une population de plus de 283 000 habitants. Il compte six unités d’admission de psychiatrie générale consacrées aux patients adultes, représentant 110 lits regroupés en trois pôles, une unité intersectorielle accueillant les sujets âgés – comprenant notamment seize lits d’hospitalisation complète et cinquante-six lits de longue durée – et un pôle de psychiatrie infanto-juvénile de quatorze places.

La file active des patients adultes et mineurs pris en charge par l’établissement est stable sur deux ans mais le nombre des hospitalisations complètes est en baisse de près de 5 % en 2019.  Parmi ces hospitalisations, la part des mesures de soins sans consentement est également en diminution sur deux ans, mais la proportion des admissions fondées sur un seul certificat médical est élevée puisqu’elle représente plus de 50 % du total de ces mesures en 2019.

Les conditions matérielles de la prise en charge des patients en soins contraints sont globalement satisfaisantes, à l’exception de celles prévalant à l’unité médico-psychologique installée au sein du centre hospitalier de Quimper.

Sur le site de l’EPSM E. Gourmelen, des améliorations matérielles gagneraient cependant à être mises en place, notamment s’agissant des espaces d’isolement et de contention. Au service des urgences du centre hospitalier de Quimper, au moment de la visite des contrôleurs, plusieurs patients étaient installés dans une salle d’attente ou même sur des brancards dans un couloir. Le projet commun de l’EPSM et du centre hospitalier de créer trois lits d’hospitalisation psychiatrique de courte durée mérite ainsi attention.

L’organisation générale de la prise en charge médicale est efficiente malgré des approches thérapeutiques différentes et deux points de fragilité.

D’une part, les médecins urgentistes interviennent en première intention en cas d’agitation et mettent parfois en œuvre des contentions sans mention dans un quelconque registre.

D’autre part, rien ne palliait, au moment de la visite, la vacance de deux postes de médecins généralistes de l’EPSM.

Par ailleurs, si la pluralité des politiques médicales mises en œuvre au sein des unités d’admission n’est pas exclusive d’offres de soins individualisées, qui tendent à limiter la durée des séjours, ces approches induisent en pratique des traitements différenciés des patients, particulièrement sur les restrictions à leurs droits et libertés. Ainsi, en fonction du secteur dont le patient relève, et donc du pôle dans lequel il sera pris en charge, l’hospitalisation en unité fermée ou ouverte diffèrera sensiblement ; son téléphone portable lui sera retiré ou non ; il sera filmé en continu s’il est placé à l’isolement, ou non. Enfin il bénéficiera dans un pôle seulement d’une offre riche et diversifiée d’ateliers thérapeutiques.

S’agissant des droits et libertés des patients, malgré la réflexion et les actions d’ores et déjà engagées par la direction de l’établissement des axes d’amélioration sont identifiables.

En premier lieu, les unités visitées sont pour l’essentiel fermées et leur ouverture constitue l’exception ; les patients en soins sans consentement sont prioritairement orientés vers des unités fermées, ou qui le sont du fait de leur prise en charge – ce, alors qu’aucun texte n’impose que les patients dont l’hospitalisation est contrainte soient enfermés. Si la réflexion relative à la liberté d’aller et venir des patients semble effective au sein des instances de l’établissement, plusieurs psychiatres y étant notamment favorables, elle paraît se heurter à de nombreuses résistances.

En second lieu, diverses limites aux droits des patients doivent être levées, qu’il s’agisse de la motivation des décisions du directeur, du recueil des observations du patient lors de la réunion du collège des professionnels de santé ou de la confidentialité de l’hospitalisation.

En outre, l’information donnée par les médecins et les équipes soignantes aux patients en soins sans consentement doit être améliorée, tant lors de l’admission de ces derniers en hospitalisation qu’au décours de leur parcours de soins.

Enfin, les conditions matérielles de l’accueil des familles doivent être améliorées.

L’établissement est enfin engagé dans une démarche encourageante, qu’il doit poursuivre et approfondir, s’agissant des pratiques d’isolement et de contention mais il doit être mis fin sans délai à certaines de ces pratiques dégradantes et portant atteinte à la dignité des patients.

Si diverses instances – dont notamment, depuis 2017, un comité de pilotage « droits des patients » et une évaluation des pratiques professionnelles consacrée aux pratiques d’isolement – mènent des réflexions à cet égard, la pratique de l’isolement concerne tout l’établissement et les statistiques communiquées révèlent un recours à la contention plus généralisé que les différents groupes de travail et instances traitant du sujet ne le laissaient supposer.

En outre, il est fréquemment recouru à des mesures d’isolement en espaces non dédiés, le cas échéant au moyen de décisions « si besoin » s’agissant, notamment, des patients âgés.

Du point de vue opérationnel, l’EPSM ne compte « que » quatre chambres d’isolement. Cependant, aucun de ces espaces n’est équipé de bouton d’appel et deux d’entre eux sont dotés de systèmes de vidéosurveillance qui s’avèrent attentatoires à la dignité. En effet, comme l’accès aux sanitaires peut y être ponctuellement fermé, le patient n’a d’autre choix qu’un urinal sous l’œil de la caméra.

Dans ses observations relatives au rapport provisoire de visite qui lui a été communiqué, la direction de l’établissement ne conteste pour l’essentiel pas le bien-fondé des constats opérés par les contrôleurs et des recommandations émises. Si elle souligne avoir déjà pris en compte certaines d’entre-elles, elle n’apporte pas pour les autres de perspective d’amélioration.