Site du Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté

Rapport de visite de l’établissement public de santé mentale Lille-Métropole à Armentières (Nord)

Rapport de visite de l’établissement public de santé mentale de Lille-Métropole (Nord)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, au ministère de la santé auquel un délai de huit semaines a été fixé pour produire ses observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

Suivi des recommandations à 3 ans – Etablissement public de santé mentale de Lille Métropole – sites de Lille et Armentières

 

Synthèse

En application de la loi du 30 octobre 2007 qui a institué le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), sept contrôleurs ont visité l’établissement public de santé mentale (EPSM) Lille-Métropole, sur ses sites d’Armentières et de Lille, entre le 9 et le 13 décembre 2019.

Un rapport provisoire a été adressé à la direction de l’établissement, au directeur de la délégation territoriale de l’agence régionale de santé (ARS) des Hauts-de-France, aux chefs de juridiction du tribunal judiciaire de Lille ainsi qu’au directeur de cabinet du préfet du Nord. Seule la directrice de l’EPSM a fait valoir ses observations intégrées au présent rapport.

L’EPSM Lille-Métropole assure les soins de psychiatrie sur neuf secteurs de psychiatrie générale (649 880 hab. dont 506 934 adultes) et un secteur de psychiatrie infanto-juvénile (273 069 hab. dont 70 829 de moins de 18 ans). Les secteurs couvrent des populations qui vont de 64 700 habitants pour le secteur G10 à 118 755 habitants (secteurs G16-17 réunis). Les unités d’hospitalisation complète de l’EPSM sont réparties sur quatre sites : Armentières, qui est le siège de l’établissement (quatre-vingt-trois lits), Tourcoing (quarante-quatre lits), Seclin (trente et un lits) et la Clinique Jérôme Bosch de Lille (dix lits).

Les contrôleurs ont visité les cinq unités du site d’Armentières correspondant aux secteurs G07, G18, G19, G20, ainsi que l’unité intersectorielle de psychiatrie infanto-juvénile Nicolas de Staël et, à Lille, la clinique Jérôme Bosch du secteur G21, la structure de coordination ambulatoire de même que les services d’urgence.

Porté par son médecin chef, le secteur G21 s’est inscrit depuis plus de trente ans dans un modèle de psychiatrie citoyenne. Il s’agit d’une approche de soins en santé mentale communautaire, alternative à l’hospitalisation et respectueuse de la dignité et des droits des patients. L’organisation des soins est conçue en partenariat avec les médecins généralistes, les familles et les acteurs du champ social. L’isolement et la contention ne sont que rarement pratiqués au sein de ce secteur.

Au travers du projet médical de l’établissement, toutes les structures de l’EPSM Lille-Métropole ont redéfini leurs orientations privilégiant de nombreuses alternatives ambulatoires et l’intégration des patients dans la communauté. En conséquence, l’activité d’hospitalisation complète adulte est en baisse constante et les patients en soins sans consentement sont suivis, dans leur majorité, en milieu extra hospitalier.

Cependant si les filières de prise en charge somatique et psychiatrique répondent aux besoins de soins et respectent globalement les droits de patients, toutes les unités d’hospitalisation d’Armentières sont fermées réduisant la liberté d’aller et venir, y compris pour ceux des patients admis en soins libres. Ces derniers, ne serait-ce que pour sortir dans le parc de l’établissement, doivent bien souvent attendre l’accord verbal de l’équipe paramédicale, voire d’un médecin. Pour les patients en soins consentement, les sorties dans le parc sont même considérées comme des sorties extérieures : elles nécessitent une décision formelle (du préfet ou du psychiatre, selon leur statut). Par ailleurs, les chambres de certaines unités sont également inaccessibles durant la journée. Les préoccupations sécuritaires priment donc sur le droit à la liberté de circulation et sont en contradiction avec les concepts d’autonomie et de liberté des patients exprimés tant dans le projet médical qu’au sein des différentes instances. Par ailleurs, hors le secteur G21, l’isolement et la contention sont encore régulièrement pratiqués, à une fréquence certes moindre que dans la plupart des établissements psychiatriques visités par le CGLPL, mais pour des durées souvent trop longues. A ce titre, des différences importantes ont été constatées entre les secteurs (durées moyennes de l’isolement allant d’une journée et demie à cinq jours selon les unités). Il en va de même pour la contention : dans deux unités, une majorité d’entre elles dépassent les vingt-quatre heures et les durées maximales relevées sont préoccupantes (trente-trois jours). Une analyse plus fine des pratiques en équipe pluridisciplinaire pourrait contribuer à les modifier. Il convient de préciser que l’établissement a tenu compte d’une partie des recommandations émises par les contrôleurs dès réception du rapport provisoire et a engagé une réflexion institutionnelle au sein des instances de gouvernance ainsi qu’au travers de groupes de travail. Les mesures d’ores et déjà mises en œuvre sont mentionnées dans le présent rapport.