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Rapport de la deuxième visite du centre éducatif fermé de Châtillon-sur-Seine (Côte-d’Or)

Rapport de la deuxième visite du centre éducatif fermé de Châtillon-sur-Seine (Côte-d’Or)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, au ministère de la justice auquel un délai de quatre semaines a été fixé pour produire ses observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

Suivi des recommandations à 3 ans – Centre éducatif fermé de Châtillon-sur-Seine (2e visite)

 

Synthèse

Trois contrôleurs ont effectué une visite inopinée du centre éducatif fermé (CEF) de Châtillon-sur-Seine (Côte-d’Or) du 7 au 10 décembre 2020. Il s’agissait du second contrôle de cet établissement après celui réalisé en février 2011.

Les dysfonctionnements relevés lors de la visite ont conduit la Contrôleure générale à alerter – par courrier en date du 29 janvier 2021 – le garde des Sceaux, ministre de la justice, de ses inquiétudes sur la fragilité de l’équipe éducative, insuffisamment formée pour assurer l’encadrement éducatif des mineurs. Le ministre a, le 25 février 2021, répondu au CGLPL en récapitulant les difficultés rencontrées par le CEF de Châtillon-sur-Seine en termes de recrutement et de stabilisation des professionnels et les mesures mises en œuvre pour tenter d’y remédier et en exposant les dispositions prises à l’échelle nationale pour lutter contre les dysfonctionnements structurels des CEF.

Un rapport provisoire a été adressé le 4 juin 2021 à la direction de l’établissement, au directeur interrégional (DIR) et au directeur territoriale (DT) de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), ainsi qu’aux chefs de juridiction. Le parquet a fait savoir qu’il n’avait pas d’observation à formuler.  Les trois directions ont adressé leurs observations au rapport provisoire, par courriers en date du 30 juin et 3 juillet, ainsi qu’un « Plan d’actions 2021-2022 » rédigé à l’issue du contrôle et un « Plan de sécurisation et de continuité des prises en charge » élaboré « afin de réduire le nombre de mineurs présents au CEF durant l’été et ainsi de pouvoir préparer la rentrée en tenant compte » des recommandations du CGLPL, selon les termes du DT. Les observations – intégrées dans le présent rapport – et les documents transmis sont de nature, grâce à l’ampleur des actions envisagées ou d’ores et déjà mises en œuvre, à lever une large majorité des vingt-et-une recommandations émises dans le rapport provisoire.

Unique CEF du département et l’un des deux seuls en fonctionnement de la DIR, c’est un établissement habilité à prendre en charge onze mineurs – théoriquement garçons et filles – de 16 à 18 ans. Cependant, la configuration des locaux ne la favorisant pas, la mixité n’est pas appliquée au CEF et aucune jeune fille n’a été accueillie au CEF depuis 2007.

Les contrôleurs ont relevé dans cet établissement d’importants dysfonctionnements – essentiellement liés aux ressources humaines – induisant de graves carences dans la fonction éducative et de nombreux manquements au devoir de surveillance des mineurs.

En effet, au moment de la visite, le pôle éducatif, composé de quinze agents, ne compte que cinq titulaires dont deux ont été titularisés sur le poste d’éducateur sans bénéficier de formation initiale. Quatre des dix agents contractuels n’ont aucun diplôme. Le lien de ces agents au service est précaire puisqu’ils bénéficient de contrats courts, d’un à huit mois, parfois reconduits à leur terme, qui interdisent toute professionnalisation via la formation continue. Le CEF est encadré par une directrice, contractuelle en poste depuis trois mois, et un responsable d’unité éducative (RUE), également contractuel, présent depuis un an ; le second poste de RUE est vacant.

Cette situation est aggravée par un turn-over structurel dans l’équipe de direction comme dans l’équipe éducative et un absentéisme important ; de plus, des manquements au respect du cadre administratif par les éducateurs sont fréquemment relevés.

Les contrôleurs notent également l’absence d’appropriation, voire de connaissance, et de mise en œuvre des documents qui doivent poser le cadre de fonctionnement du CEF. Le projet de service 2018-2023 existe mais n’est connu de personne. Si l’élaboration du règlement de fonctionnement a été faite en septembre dernier avec la participation de l’ensemble de l’équipe, seule une partie d’entre elle semble se l’être approprié et y adhérer ce qui pose naturellement des difficultés aux éducateurs qui s’attachent au cadre pour stabiliser les mineurs.

Le CEF se caractérise également par une absence de pluridisciplinarité et de travail d’équipe. Les réunions hebdomadaires pour mettre en place les prises en charge ont été supprimées depuis le début de la crise sanitaire et ne sont pas remises en place au moment du contrôle.

Les locaux sont vétustes et globalement peu adaptés, ils ne sont pas appropriés par les mineurs. Les locaux communs accessibles aux jeunes sont peu nombreux, mal équipés et guère accueillants. Un vaste projet de réhabilitation de l’ensemble de la partie hébergement (avec notamment la création de sanitaires dans chaque chambre), qui devait débuter au printemps 2020, a été suspendu en raison de la crise sanitaire ; selon les informations fournies dans les observations au rapport provisoire, d’importants travaux ont été réalisés au cours de l’été 2021.

L’accompagnement sanitaire est de qualité et très bien protocolisé, le travail d’insertion bénéficie de nombreux partenariats, l’enseignante est très investie mais son travail est parfois bridé le planning hebdomadaire des jeunes élaboré par le responsable d’unité éducative sans concertation.