Rapport de visite des locaux de garde à vue de la police judiciaire de Paris
Observations du ministère de l’intérieur – Locaux de la police judiciaire de Paris
Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, aux ministères de l’intérieur et de la justice auxquels un délai de huit semaines a été fixé pour produire leurs observations.
Synthèse
Deux contrôleurs, accompagnés d’une stagiaire, ont effectué, les 5 et 6 décembre 2018, une visite des locaux de garde à vue de la police judiciaire (PJ) de Paris, situés rue du Bastion (17ème arrondissement).
Un rapport provisoire a été adressé le 5 février 2019 au directeur de la PJ et au procureur de la République de Paris. Le présent rapport a intégré les observations que le chef d’état-major de la direction de la Police Judiciaire a transmises, le 21 mars 2019, par courrier électronique.
La PJ de Paris est installée, depuis septembre 2017, dans le bâtiment de la direction régionale de la police judiciaire (DRPJ), qui est attenant à celui du tribunal de grande instance de Paris.
La DRPJ appartient à la préfecture de police. Son ressort couvre Paris et les trois départements de la petite couronne (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne). Elle est également compétente sur des services basés en dehors du bâtiment de la rue du Bastion, d’une part, les trois directions de police judiciaire (DPJ) de Paris et les services départementaux de police judiciaire (SDPJ) des trois départements de la petite couronne, d’autre part, la brigade de recherche et d’intervention (BRI).
Les brigades de lutte contre la criminalité et la délinquance organisée et/ou spécialisée – criminelle, répression du banditisme, stupéfiants, financière, protection des mineurs, proxénétisme, exécution des décisions de justice – sont regroupées dans un immeuble vaste, fonctionnel et moderne, qui tranche avec les locaux précédemment occupés, au 36 du quai des Orfèvres et rue du Château-des-Rentiers notamment.
L’ensemble des opérations liées à la garde à vue se déroule au sein de deux plateaux sécurisés, situés au 4ème et au 5ème étages du bâtiment, comprenant chacun dix-huit cellules individuelles – dont deux pour mineurs et une pour personne à mobilité réduite – et trois cellules collectives de cinq places (soit une capacité totale de soixante-six places), des locaux d’audition, des bureaux d’entretien avec les avocats, deux cabines de visioconférence. Seules les opérations de signalisation et les examens médicaux s’effectuent dans des locaux du rez-de-chaussée.
Du fait de cette configuration, les enquêteurs, les avocats, les interprètes et les autres intervenants se déplacent à l’étage du plateau où ont été placées les personnes gardées à vue. L’organisation mise en place permet de sécuriser les gardes à vue et de rationaliser les circulations en évitant tout croisement avec les témoins et les victimes. Elle constitue toutefois une « révolution » dans les habitudes de travail des enquêteurs.
Le volume des présences au sein des locaux est mesuré sur la base des « surveillances gardées » (au nombre de 7 670, au 30 novembre 2018), soit le nombre de personnes présentes chaque jour au titre de la garde à vue et de la retenue judiciaire. Une même personne est donc comptée autant de fois qu’elle passe de jours en garde à vue, étant précisé que la plupart des gardes à vue sont prolongées, notamment celles prises par la brigade des stupéfiants. Pour les onze mois échus de l’année 2018, on estime, très approximativement, à 3 500 le nombre de personnes ayant séjourné en geôle.
Les personnes sont gardées à vue dans des conditions matérielles satisfaisantes : les cellules sont propres et bien équipées (point d’eau et WC derrière un muret dans les cellules individuelles), l’hygiène est correcte (une couverture synthétique en polaire à usage unique est remise à chaque personne), les fonctionnaires affectés à la surveillance sont attentifs à une gestion apaisée de leur secteur.
Les droits inhérents à la garde à vue sont respectés. L’attention portée par les enquêteurs à sécuriser leur travail sur le plan procédural constitue la principale garantie de ce respect.
Deux voies d’amélioration ont été toutefois suggérées auprès des responsables lors d’une réunion de restitution organisée en fin de visite.
La première est en rapport avec une des caractéristiques principales des gardes à vue prises à la PJ de Paris, celle d’être d’une durée supérieure à la moyenne. A ce titre, il a été recommandé :
- d’éteindre la lumière la nuit en cellule afin de permettre de se reposer, ce qui ne compromettrait pas la surveillance dans la mesure où les caméras sont dotées d’un dispositif infrarouge visualisant l’intérieur d’une cellule même dans l’obscurité ;
- de prévoir une alimentation plus variée que celle proposée, en acceptant notamment des plats cuisinés à l’extérieur et en distribuant une boisson chaude le matin ;
- d’assurer un nettoyage plus fréquent des cellules, en organisant le déplacement temporaire des personnes gardées à vue durant le temps de ce ménage ;
- d’organiser réellement l’accès à la douche et la remise des kits d’hygiène ;
- d’aménager un endroit pour permettre aux personnes de fumer.
La seconde a trait au respect du droit de communiquer avec un proche. Une réflexion devrait être conduite pour envisager un lieu de rencontre possible au sein d’une zone sécurisée qui, par définition, exclut la présence de tiers.