Rapport de la deuxième visite du centre éducatif fermé de Bure-sur-Yvette (Essonne)
Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, au ministère de la justice auquel un délai de huit semaines a été fixé pour produire ses observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.
Suivi des recommandations à 3 ans – CEF de Bures-sur-Yvette (2e visite)
Synthèse
Le centre éducatif fermé (CEF) de Bures-sur-Yvette (Essonne) a fait l’objet d’une visite inopinée du 4 au 6 février 2019 du contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL). Il s’agissait d’une deuxième visite, la première étant intervenue du 12 au 14 novembre 2013. Le rapport provisoire faisant suite à cette visite a été adressé par courriers datés du 18 avril 2019 à la direction du CEF de Bures-sur-Yvette, à la direction territoriale de la protection judiciaire de la jeunesse (DT) de l’Essonne, au président du tribunal de grande instance (TGI) d’Evry et au procureur de la République près ce TGI, et par courrier daté du 18 avril 2019 à la direction interrégionale de la protection judiciaire (DI) de la jeunesse d’Ile-de-France et d’Outre-mer en vue de recueillir leurs éventuelles observations. Le CGLPL n’a reçu aucune réponse. Lors de la première visite, seules les observations de la direction du CEF étaient parvenues au CGLPL.
L’arrêté ministériel portant création du CEF de Bures-sur-Yvette a été pris le 20 février 2013, quatre mois après l’accueil du premier mineur, la capacité du CEF avait été fixée à douze places, filles et garçons de 15 à 18 ans. Lors de la visite de février 2019, le CEF n’accueillait plus que des garçons – l’arrêté de création n’ayant cependant pas été modifié. La capacité avait été limitée à la mi-décembre 2018 à six mineurs sur décision de la DI à la suite d’incidents survenus durant l’année 2018.
Depuis sa création, le CEF a connu cinq directeurs successifs, la directrice actuelle ayant pris ses fonctions en septembre 2017, et six responsables d’unité éducative (RUE) dans la fonction de chef du pôle pédagogique. En outre, le poste de RUE « chef du pôle éducatif » a été occupé de façon intermittente, ce poste était vacant lors de la visite de février 2019. La RUE « chef du pôle pédagogique » avait pris ses fonctions en septembre 2018. Les contrôleurs ont constaté que les mineurs présents étaient correctement pris en charge même si les éducateurs étaient dans une large majorité en manque d’expérience et de formation. Des travaux importants de remise en état et de sécurisation ont été réalisés au cours des deux dernières années, même si tous n’étaient pas achevés. Globalement, les locaux permettent d’accueillir dignement les mineurs.
En 2013 le CGLPL dressait le constat que le pilotage par la DT s’était révélé défaillant dans de nombreux points. En 2019 la situation est manifestement inversée : le pilotage par la DT est très serré et ne laisse que peu de place aux initiatives de la direction du CEF. Le projet d’établissement n’est toujours pas établi. Les dossiers des mineurs ne sont toujours pas constitués de façon à en faire des outils de travail : les documents sont manquants, mal rangés. En revanche les écrits aux services de milieu ouvert et aux magistrats sont devenus globalement des outils de qualité, utiles pour la suite de la prise en charge du jeune. Les plannings d’activités sont établis et sont appliqués ; l’oisiveté fréquemment constatée en 2013 a laissé la place à une activité normale. Le taux de fugue n’est plus alarmant. L’instauration d’un « sas d’accueil » pour prendre en charge individuellement les nouveaux arrivants est une évolution positive. La prise en charge sanitaire est manifestement assurée, mais la question de la limite entre secret médical et secret professionnel partagé n’a pas trouvé de réponse satisfaisante ; aucune convention n’a été signée entre le CEF et l’hôpital psychiatrique de secteur.
En 2019, le constat est que la prise en charge des mineurs a évolué globalement de façon positive en raison des efforts conjugués de la direction du CEF, de la DT et de la DI, en dépit du manque d’expérience des éducateurs. En ce qui concerne ces derniers, 85 % sont des contractuels dont l’échéance des contrats est fixée au 1er septembre 2019, sachant que les contrats ont été renouvelés pour les plus anciens au 1er septembre 2017 et au 1er septembre 2018. L’incertitude dans laquelle sont placés ces contractuels pendant l’été – ils sont informés du renouvellement de leurs contrats dans les derniers jours de juillet ou les premiers jours d’août – ne leur permet pas de s’investir pleinement pendant ces deux mois.
En 2019, comme en 2013, les contrôleurs ont constaté que les relations de la direction du CEF avec la DT et la DI étaient très difficiles, pour des motifs manifestement différents. Si la CGLPL ne peut que se féliciter de l’engagement de la DT et de la DI pour améliorer le cadre de la prise en charge, le CGLPL s’interroge sur les limites d’un tel engagement qui a manifestement besoin d’être borné.
Le CGLPL espère que la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique permettra de recruter du personnel davantage stabilisé dans le CEF de Bures-sur-Yvette et dans les autres CEF gérés par la PJJ.