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Rapport de visite du centre hospitalier de l’Estran à Pontorson (Manche)

Rapport de visite du centre hospitalier de l’Estran à Pontorson (Manche)

Observations du ministère de la santé – Centre hospitalier de l’Estran à Pontorson

 

Synthèse

Sept contrôleurs ont effectué une visite du centre hospitalier (CH) de l’Estran situé à Pontorson (Manche) du 8 au 12 octobre 2018.

Seul établissement public de santé mentale du département, le CH couvre deux secteurs de psychiatrie (50G06 et 50G07), un territoire de plus de 3 000 km2 au Sud du département et une population d’environ 150 000 personnes. Cependant, la notion de secteur a totalement disparu de l’organisation au profit de celle de territoire et les unités d’hospitalisation sont intersectorielles, la répartition des patients en leur sein étant gouvernée par leur statut d’hospitalisation et/ou leur état clinique.

Son activité sanitaire et médico-sociale s’exerce sur six pôles, dont cinq cliniques. Le centre hospitalier compte 402 lits et 200 places – dont 108 lits d’hospitalisation complète en psychiatrie adulte répartis sur sept unités (quatre unités d’admission et trois unités au long cours) ; ces unités d’hospitalisation sont toutes situées sur le site de Pontorson.

Si le cadre institutionnel n’est pas, au moment de la visite, véritablement formalisé – de nombreux documents de référence ne sont pas encore finalisés (projets et contrats de pôle, règlement intérieur) – il existe une véritable politique de soins psychiatriques au sein de l’établissement et une bonne articulation entre l’intra et l’extra hospitalier. Un projet de réorganisation de l’hospitalisation complète est en effet en cours de réflexion depuis 2016, orientée notamment vers une diminution des lits des unités de soins au long cours et une diminution des lits des unités d’admission au profit d’un renforcement des structures ambulatoires.

Les difficultés de ressources humaines ont été surmontées, peu de postes sont désormais non pourvus, le personnel est relativement stable et le taux d’absentéisme plus bas que la moyenne nationale.

La prise en charge des patients est humaine et bienveillante, les équipes sont dynamiques et motivées et ont à cœur d’offrir une prise en charge individualisée et adaptée à l’état clinique des patients. Les restrictions aux libertés et aux droits des patients dans les unités sont globalement mesurées et s’appliquent au cas par cas, en fonction de l’état de santé (les patients peuvent conserver leur téléphone portable, l’accès au tabac n’est pas restrictif, le port du pyjama n’est jamais systématique).

L’organisation, le fonctionnement et le programme des activités thérapeutiques proposées par l’unité transversale des activités thérapeutiques constituent un point fort pour les patients des unités du pôle de santé mentale ; cette unité dispose d’outils diversifiés et d’un personnel qualifié.

Les conditions matérielles d’hébergement sont variables d’un bâtiment à l’autre mais sont globalement correctes (à l’exception de l’unité évoquée ci-après), les locaux sont bien entretenus et très propres ; les chambres sont toutes équipées de sanitaires avec douche. Cependant, six des dix chambres de l’unité Henri Ey – qui accueille des patients présentant des troubles graves du comportement – sont dépourvues de WC. Or, pour des raisons de sécurité, ces patients sont enfermés dans leur chambre la nuit et en sont réduits à utiliser des chaises percées. Cette situation indigne est par ailleurs parfois source d’aggravation des symptômes de certains patients. Un projet de déménagement de cette unité, en cours d’étude au moment de la visite, devait être soumis aux instances en décembre 2018.

D’autres points doivent également être améliorés.

L’établissement ne dispose pas de projet d’organisation de la prise en charge des soins somatiques ni de procédure de prévention et de prise en charge de certains risques identifiés en psychiatrie. Aucun bilan d’activité n’a pu être fourni par le somaticien référent.

La tenue du registre des mesures d’isolement et de contention n’est pas satisfaisante ; les recueils de données concernant ces mesures ne sont pas harmonisés, certaines mesures n’y sont pas tracées et il ne fait l’objet d’aucune exploitation annuelle quantitative et qualitative.

De même, le registre de la loi ne répond pas aux exigences légales et ne permet pas un contrôle rapide de la situation individuelle des patients. Son examen attentif a cependant permis aux contrôleurs de s’apercevoir d’un certain nombre de dysfonctionnements et de méconnaissances des exigences de la loi de 2011 : retards de notification des décisions d’admission ou de maintien en soins sans consentement et des droits des patients, absence de réunion du collège des professionnels de santé dans certaines situations, détournements de la notion de programme de soins.