Rapport de la deuxième visite des centres de rétention administrative 1, 2 et 3 de Vincennes (Paris)
Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, au ministère de l’intérieur auquel un délai de huit semaines a été fixé pour produire ses observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.
Suivi des recommandations à 3 ans – Centre de rétention administrative de Vincennes (2e visite)
Synthèse
Accompagnée d’une équipe de six contrôleurs, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté a visité du 14 au 16 février 2017 le centre de rétention administrative (CRA) dit « de Vincennes », en l’occurrence les centres de rétention administrative numéros 1, 2 et 3 de Paris situés dans le Fort de la Gravelle avenue de l’École de Joinville à Paris 12ème arrondissement. Cette visite était la seconde après celle du CRA1 (juillet 2010) et des CRA2 et 3 (février 2011).
Un rapport de constat a été rédigé et envoyé le 11 juillet 2017 au commandant de police, chef du centre de rétention administrative. Par courrier daté du 28 août 2017, le préfet de police a fait valoir ses observations sur celles des recommandations qui le concernaient. L’intégralité de ses réponses a été intégrée dans le présent rapport de visite.
Trois éléments principaux ont été relevés lors de cette visite. Tout d’abord le caractère théorique de l’existence de trois centres de rétention administrative sur le site de la redoute de Gravelle dans le bois de Vincennes, ensuite l’état du bâtiment 1, enfin l’insuffisance non pas quantitative mais bien qualitative du service de surveillance. A ces trois observations principales s’ajoutent des recommandations plus ponctuelles qui, pour certaines, ont fait l’objet de corrections immédiates de la part de l’administration.
Malgré la création juridique de trois CRA sur le site du Fort de la Gravelle, la réalité du terrain, tant pour l’administration que pour les intervenants et pour les personnes privées de liberté s’impose. Il y a un centre de rétention administrative divisée artificiellement en trois entités pour répondre aux exigences du CESEDA qui limite à 140 le nombre de personnes susceptible d’être accueillies dans un CRA : un seul chef de centre, un seul greffe, un seul service de police, un seul prestataire privé, un bureau de l’OFII et un bureau de l’AFFSAM avec en corollaire des personnes retenues qui changent de « CRA » sur décision d’un brigadier de police.
Dans sa réponse à ce sujet, le préfet de police évoque la jurisprudence du conseil d’État du 18 novembre 2011, concernant les CRA du Mesnil-Amelot en estimant que « la situation des CRA situés dans le bois de Vincennes doit être analysée à l’aune de cette interprétation du Conseil d’État et est à ce titre conforme à la réglementation en vigueur ».
Malgré cette conformité revendiquée, la même correspondance annonce une modification profonde de l’organisation des trois CRA en deux entités qui se verront dotées chacune d’une direction propre.
Le second point important de la visite est l’état devenu indigne du bâtiment 1, dit « CRA 1 » : toilettes pestilentielles, délabrement général, locaux sur-occupés. Le niveau de détérioration est tel qu’on doute de la faisabilité d’une réfection, tant techniquement qu’économiquement. Dans sa réponse, le préfet de police fait valoir les investissements déjà consentis ou les modalités de maintenance, tous éléments qui ne peuvent occulter une réalité difficilement contestable et que l’on ne retrouve pas dans les deux autres bâtiments.
Enfin, le service de garde est apparu pléthorique en comparaison des centres de rétention administrative gérés par la police aux frontières mais composé pour l’essentiel de fonctionnaires sortant d’école sans motivation pour ces missions peu valorisantes et surtout très mal encadrés en raison d’un déficit chronique de gradés. Le préfet de police a reconnu le problème et a annoncé dans son courrier tenter de le résoudre par une modification des règles de gestion du personnel.
Les autres recommandations ont, soit fait l’objet de corrections immédiates à la suite du rapport de constat, soit été contestées au motif des impératifs de la sécurité, (comme les consultations médicales qui s’effectuent portes ouvertes avec un policier en faction à proximité) soit en dernier lieu réfutées (comme celles portant sur la finalité des missions de l’équipe médicale au sein d’un centre de rétention administrative).