Rapport de visite du centre hospitalier d’Alès-Cévennes (Gard)
Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, au ministère de la santé auquel un délai de huit semaines a été fixé pour produire ses observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.
SYNTHESE
Quatre contrôleurs ont effectué une visite annoncée du centre hospitalier (CH) d’Alès-Cévennes (Gard) du lundi 30 novembre au vendredi 4 décembre 2015. A l’issue de leur visite, les contrôleurs ont rédigé un rapport de constat, qui a été transmis le 9 juin 2016 au directeur du centre hospitalier. Celui-ci a formulé des observations dans un courrier adressé au Contrôle général des lieux de privation de liberté le 6 juillet 2016.
L’établissement public de santé s’inscrit avec six autres établissements du Gard dans la communauté hospitalière de territoire Cévennes-Gard-Camargue. Cet hôpital récent, objet d’une rénovation en 2011, regroupe de nombreuses spécialités au sein de six pôles d’activité[1].
Le pôle de psychiatrie comprend deux secteurs de psychiatrie générale et un secteur de psychiatrie infanto-juvénile, pour la prise en charge de la population de la ville d’Alès et celle du bassin alésien. Le CH ne dispose pas de structure pour hospitaliser à temps complet des enfants et des adolescents. La psychiatrie de l’adulte est organisée autour de trois unités ouvertes de 66 lits dont une unité intersectorielle de 18 lits pour les patients chroniques de longue durée. Les deux autres unités dites « entrantes » sont dédiées à l’accueil des patients de leur secteur. Le taux d’occupation des unités d’hospitalisation était entre 80% et 100% en 2014 et 2015.
Le pôle psychiatrie est implanté dans un bâtiment à proximité immédiate des services administratifs et logistiques du centre hospitalier.
Des points forts, parmi ceux cités dans le rapport, sont ressortis de la visite des contrôleurs concernant :
Les locaux :
- l’agencement fonctionnel des locaux en concertation avec les équipes soignantes et la luminosité des locaux collectifs et individuels (baies vitrées) offrant aux patients un espace de vie convivial (la cafeteria au rez-de-chaussée est le passage obligé vers le patio central) ;
- la propreté des locaux collectifs et des locaux d’hébergement ;
- les chambres individuelles normales et des chambres fermables fermées (CFF) avec un cabinet de toilette dont l’équipement et la fermeture possible de l’intérieur, préservent l’intimité et la dignité des patients ;
La formation :
- le personnel infirmier bénéficie d’une offre de formation spécialisée et adaptée à la prise en charge des patients en psychiatrie, notamment à des ateliers thérapeutiques animés par des soignants selon une rotation semestrielle.
Le projet de soins :
- la qualité du projet de soins orienté vers l’autonomisation et la resocialisation des patients (des activités diversifiées au pôle psychiatrie, la création d’un groupe de « soignants-soignés » à l’unité intersectorielle).
Les activités :
- le dynamisme de l’association locale finançant l’essentiel des activités thérapeutiques en faisant participer quelques patients et apportant un soutien financier aux patients en tant que de besoin.
Certains points restent cependant à améliorer.
Le pôle psychiatrie adulte ne dispose pas de structure pour hospitaliser à temps complet un enfant-adolescent. Il arrive qu’à la demande de l’unité psychiatrique de liaison et d’urgence (UPLU), une unité accueille en urgence et dans un temps court un patient mineur de 16 à 18 ans[2] dans l’attente de son transfert dans les unités de pédopsychiatrie d’Uzès ou de Nîmes.
Au plan des ressources humaines, les contrôleurs ont relevé un manque de personnel médical alors que l’activité était plutôt en augmentation. Au moment de leur visite, deux postes de médecins psychiatres étaient vacants. Cette situation oblige le chef de pôle à se partager entre ses activités de chef de pôle, les consultations ambulatoires en centre médico-psychologique (CMP) et la prise de permanence à tour de rôle des psychiatres à l’UPLU. En dépit de leur engagement personnel, le temps de présence des médecins auprès des patients n’est pas continu, ce qui nuit à la qualité de la prise en charge. En l’absence de médecin généraliste au pôle psychiatrie, les infirmiers font appel à des internes de garde en dehors des heures ouvrables de travail. Il est indispensable d’ouvrir un ou plusieurs postes de médecin généraliste dans le service de psychiatrie.
Quant au personnel non médical, le cadre supérieur de santé se montre dynamique et très présent auprès des équipes de soignants, les absences ponctuelles n’étant pas compensées par des agents extérieurs.
Les arrêtés préfectoraux et les décisions du directeur de l’hôpital ne sont pas accompagnés de l’information complète sur les droits et les recours des patients hospitalisés sous contrainte.
Les contrôleurs ont relevé un important retard dans le classement des dossiers et dans la tenue du registre de la loi, retard résultant d’une gestion défaillante du service général des admissions. La reprise récente par le secrétariat du pôle psychiatrie est de bon augure ; la résorption du retard, considérée comme prioritaire, devrait être vite solutionnée tant le personnel est apparu motivé, compétent et très réceptif aux recommandations des contrôleurs.
L’établissement hospitalier devrait mettre en œuvre les moyens nécessaires pour assurer l’information des patients hospitalisés sous contrainte (diffusion, affichage) ainsi que pour prendre en compte la spécificité de la psychiatrie dans le règlement intérieur de l’établissement et le livret d’accueil.
Un projet de construction d’une salle pour la tenue des audiences du juge des libertés et de la détention au centre hospitalier est à l’étude ; il doit se concrétiser pour ainsi être en conformité avec les exigences de la loi de septembre 2013.
La politique du pôle psychiatrie est de ne pas pratiquer la contention physique. Le recours à l’isolement est toutefois fréquent, encadré par un protocole pour les chambres d’isolement. A son arrivée dans l’unité, la mise en pyjama est systématique mais le patient n’est pas obligatoirement placé en chambre d’isolement. L’utilisation des chambres « fermables fermées » comme des chambres d’isolement pose également question, d’autant qu’aucun protocole n’est formalisé concernant ces pratiques, attentatoires à la liberté d’aller et venir. Les mineurs y sont ainsi placés provisoirement afin d’être séparés des adultes. L’ouverture d’un registre d’isolement et de contention tant pour les chambres d’isolement que pour les chambres « fermables fermées » est à mettre en œuvre sans délai.
De manière générale, la prescription du port du pyjama pour les patients hospitalisés dans une des trois unités ouvertes est certes un moyen de repérer des sorties non autorisées, mais porte gravement atteinte à la dignité du patient.
L’aménagement des chambres d’isolement, sans accès permanent aux toilettes, sans bouton d’appel, avec un matelas posé à même le sol, n’est pas conforme au respect dû aux patients qui y sont placés.
Les contrôleurs ont constaté une attention forte des équipes soignantes malgré le déficit de poste de médecins psychiatres.
[1] Le pôle génie médical, le pôle chirurgie mère-enfant, le pôle médecine, le pôle soins aigus, le pôle psychiatrique et le pôle hébergement personnes âgées.
[2] Les mineurs de 16 ans sont admis en pédiatrie sauf en cas d’agitation extrême